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Salima Massoui

Projet

Résumé 
Les homicides et les tentatives d’homicides conjugaux envers les femmes dans un contexte migratoire sont des réalités complexes. Les études sur ce phénomène auprès des femmes issues des minorités ethnoculturelles au Canada, et particulièrement au Québec, sont peu nombreuses. Notre recherche propose de faire un premier pas pour combler ce vide en s’attardant empiriquement à l’expérience des survivantes de tentatives d’homicide conjugal. De façon plus précise, cette recherche permettra d’analyser le déroulement des trajectoires migratoires de ces survivantes et d’identifier, à travers elles, d’une part, les différentes situations de fragilisation qui s’entrecroisent et ont influencé activement leur vécu de violences (conjugales, structurelles, autres) et, d’autre part, les stratégies qu’elles ont prises elles-mêmes ou qui leur ont été proposées pour faire face à ces situations. Ce faisant, cette analyse permettra de poursuivre la réflexion sur les pratiques prometteuses en intervention auprès de ces femmes.

Problématique 
Les femmes immigrantes sont plus à risque de subir des violences vu la précarité de leur situation et de celle de leur conjoint en contexte migratoire. Les difficultés économiques, les barrières linguistiques et culturelles, la lourdeur et les limites des structures légales, sans compter les pressions familiale et/ou communautaire favorisent l’isolation dans la cellule conjugale (Benhadjoudja, 2011; Abu-Ras, 2003; Abu-Ras, 2007; Graham et al., 2008; Castro Zavala, 2013; Miedema et Wachholz, 1998; Rojas-Viger, 2007). Les hommes immigrants laissent rarement derrière eux leurs représentations patriarcales des rôles d’homme pourvoyeur et de maître du foyer présentes dans maintes cultures (Hammouche, 1997; Dyke et Saucier, 2000; Haddad et Lam, 1988). Les difficultés relatives à leur nouveau rôle dans la société d’accueil peuvent donner à certains le sentiment qu’ils ont perdu leur pouvoir dans la famille; la violence conjugale peut alors permettre de le récupérer partiellement (Bui et Morash, 2008). Il en va de même des femmes : certaines apportent des représentations culturelles et religieuses patriarcales de soumission au conjoint, de même que des représentations ou des expériences négatives des structures en place, y compris des services d’aide. Ces représentations, sans les protections communautaires habituelles, risquent davantage de mettre les femmes en danger (Alaggia et al., 2009; Kim et Zane, 2004; Gharaibeh et Oweis, 2009).Les études sur les homicides conjugaux et les tentatives d’homicides conjugaux chez les femmes immigrantes au Canada n’existent pas (à notre connaissance) et sont nécessaires.

Question de recherche
Quelles sont les situations de fragilisation tout au long des trajectoires migratoires qui déclenchent, maintiennent ou aggravent la violence conjugale jusqu’à la tentative du meurtre selon les récits des femmes immigrantes victimes?

Objectif général 
Comprendre, à l’intérieur des trajectoires migratoires des femmes, les liens dynamiques entre les dimensions sociohistoriques, familiales, conjugales et contextuelles qui ont influencé le déclenchement de la violence conjugale ou son maintien jusqu’à son aggravation en tentative d’homicide de la conjointe.

Objectifs spécifiques
Comprendre l’imbrication des situations de fragilisation pouvant conduire à une tentative d’homicide conjugal en contexte migratoire;
Décrire les transitions fragilisantes à l’intérieur des trajectoires migratoires qui ont conduit à une tentative d’homicide conjugal afin de comprendre leur influence sur le continuum de la violence conjugale;
Connaître les stratégies prises par les femmes immigrantes ou qui leur ont été proposées pour faire face à ces situations;
Saisir les stratégies mises en place par les femmes immigrantes pour survivre suite à une attaque potentiellement fatale de leur conjoint.

Cadre théorique
Intersectionnalité : L’approche féministe intersectionnelle (Crenshaw, 1991; Collins, 1990; Bilge, 2009) permet de cerner l’imbrication de multiples appartenances (genre, culture, classe, religion, race, etc.) qui, situées à l’intérieur de systèmes d’oppression, contribuent à la précarité des femmes en contexte migratoire et qui les rendent d’autant plus vulnérables. Parcours de vie : La perspective des parcours de vie (Elder et al., 2003; Elder et Giele, 2009; Gherghel, 2013; Sapin et al., 2007) permet d’observer la complexité de la trajectoire migratoire des femmes afin de saisir l’imbrication des situations de fragilisation qui expliquent l’intensification de la violence jusqu’à la tentative de meurtre par le conjoint.

Méthodologie
Méthode de collecte de données : l’entretien semi-directif sous forme de récit de vie et le calendrier historique des événements de vie (lequel garantit un minimum de standardisation des données). Échantillonnage : une vingtaine de femmes immigrantes issues de différents groupes ethnoculturels qui ont survécu à une ou des tentatives d’homicide conjugal durant les cinq dernières années et qui ont trouvé refuge dans des maisons d’hébergement de la région de Montréal, Québec et Sherbrooke. Ces maisons (à identifier) seront le point de départ pour le recrutement des participantes par tiers expertisé.

  • Stagiaire 2016-2017

Salima Massoui

massoui.salima@courrier.uqam.ca